Il a été nommé juge d’instruction en 1972 à Lyon, où il est arrivé six ans plus tôt. François Renaud a déjà derrière lui une carrière bien remplie. Né en 1923, en Indochine, d’un père médecin dans l’armée coloniale, son berceau véritable sera la Bourgogne où la guerre le plonge alors qu’il a tout juste 20 ans. Engagé à fond dans la Résistance, il se lie d’amitié dans le maquis avec une figure locale, un certain André Jarrot, un personnage haut en couleurs comme lui – futur ministre de Giscard.
Mais la guerre finie, c’est dans la magistrature qu’il décide de faire carrière. François Renaud est juge suppléant dans les colonies, où il occupe plusieurs postes, à Abidjan en 1956, mais aussi au Niger, au Mali, en Haute-Volta… Son style d’accusateur public correspond à son tempérament de fonceur et lorsqu’il arrive à Lyon, ville bientôt surnommée « Chicago-sur-Rhône », où les dossiers abondent, alimentés par les caïds de la pègre locale, son style ne laisse pas indifférent.
Les malfrats, même les plus « endurcis », ne brillent guère lorsqu’ils passent dans son cabinet. Il n’hésite pas à aller sur le terrain même, dans les bars mal fréquentés par exemple, pour se montrer provocant, en un jeu fort inhabituel pour un magistrat qui n’est pas sans risque. Ce n’est pas par hasard qu’on surnomme le juge le « Shérif ».
Pourtant, c’est à lui que l’on confie les dossiers les plus brûlants. Celui de Jean Augé, autour duquel flottent des relents politiques malsains, mais l’élimination brutale du caïd lyonnais empêche le juge d’aller au bout de ses investigations.
Le juge Renaud instruit aussi le dossier du chef de gang Guy Reynaud, dit « le Dingue », spécialiste du hold-up, qui écume la région et qui sera finalement arrêté en 1973. Il s’implique aussi dans la traque du « gang des Lyonnais » qui totalise à son actif au moins une cinquantaine de coups durant les années soixante-dix, dont le hold-up de la poste de Strasbourg où le milliard d’anciens francs raflés aurait peut-être contribué à alimenter les caisses d’un parti politique. A la tête du gang, des durs comme Joanny Chavel, Pierre Pourrat, dit « le Docteur », et surtout Edmond Vidal, dit Momon, une belle gueule de gitan.